Ton entreprise est maintenant incorporée, mais tu exerçais déjà des activités commerciales avant, sous une autre forme d’entreprise. Que ce soit en entreprise individuelle, société en nom collectif, etc. il est peut-être opportun de transférer les biens que tu possèdes dans la société par actions (inc.).
Voyons ça de plus près.
C’est quoi, un roulement?
Le roulement est donc le transfert de biens ou d’actifs d’un particulier (toi) ou d’une société en nom collectif à une société par actions (inc.). La Loi de l’impôt sur le revenu permet ainsi le transfert de certains actifs à une entreprise sans qu’il y ait d’impact fiscal immédiat.
Généralement appelé ‘’roulement fiscal’’, il permet de retarder les conséquences fiscales au moment où l’entreprise va elle-même vendre les biens roulés.
D’où le nom « roulement », parce que quand on roule quelque chose, il n’y a pas de cassure, de brèche, tout est roulé en douceur. En roulant nos actifs dans notre société par actions, c’est comme si c’était notre société qui les avait achetés dès le départ, au coût de départ! C’est donc un roulement, plutôt qu’une vente à la juste valeur marchande, pour qu’au final, la société soit propriétaire des biens roulés.
Quel est l’intérêt de faire un roulement dans mon entreprise incorporée?
Avantage #1 - le roulement est particulièrement intéressant pour le paiement des impôts et pour éviter des conséquences fiscales (ou, à tout le moins, de les différer).
Voici des exemples.
Exemple 1.
Mélanie (nom fictif) compte se verser un montant total de 100 000 $ en dividende lors de la première année fiscale de sa nouvelle inc. Si les biens de Mélanie rouler dans son entreprise sont d’une valeur de 40 000 $, dans les faits Mélanie n’aura pas besoin de se verser un dividende de 100 000 $, mais uniquement de 60 000 $, puisqu’elle aura obtenu un montant de 40 000 $ pour ses actifs roulés. À la fin de l’année, Mélanie aura tout de même eu un montant total de 100 000 $ (60 000 $ en dividendes, et 40 000 $ en roulement de ses actifs), mais paiera de l’impôt uniquement sur ses dividendes, donc uniquement sur la somme de 60 000 $.
Le roulement a donc permis à Mélanie de sortir 40 000 $ libre d’impôt.
C’est fiscalement très avantageux pour Mélanie, n’est-ce pas ?!
Exemple 2.
Marc (nom fictif) possède un entrepôt. S’il décide de le vendre à sa société, cette vente sera à la juste valeur marchande, ce qui engendre des conséquences fiscales pour Marc qui est considérée être une personne liée à son entreprise (puisqu’il en est l’actionnaire dirigeant).
Effectivement, les lois fiscales prévoient qu’une transaction entre personnes liées (Marc et sa société) est présumée faite à la juste valeur marchande, et ce, quel que soit le prix indiqué au contrat de vente. En fait, même un don est réputé être une vente à la juste valeur marchande entre personnes liées.
Et puisque la juste valeur marchande de l’entrepôt est plus élevée que le prix d’achat qu’a payé Marc il y a quelques années, il devra donc payer de l’impôt sur le gain en capital.
Pour éviter ce paiement d’impôt supplémentaire, il faut faire un roulement. En roulant l’entrepôt de Marc dans sa société par actions, nous pourrons choisir dans la convention un prix égal au coût d’achat du bâtiment. Marc n’aura donc pas de gain en capital, et pas d’impôt supplémentaire à payer!
Avantage #2 – les biens constituent le patrimoine de la société par actions et sont protégés de tes créanciers personnels.
Reprenons l’exemple de Marc (toujours un nom fictif!). Marc est personnellement propriétaire de l’entrepôt. Un beau jour, il est poursuivi, à son nom personnel, pour X raison et est condamné à payer une lourde somme. Cet entrepôt pourra être saisi pour le paiement de cette dette puisqu’il appartient à Marc. Or, si cet actif a été roulé dans l’entreprise, celui-ci n’est pas saisissable puisque c’est la société par actions qui en est la propriétaire.
Quels biens puis-je rouler dans ma société?
Les biens peuvent constituer en plusieurs choses : des camions de service, des outils, du matériel informatique (ordinateur, imprimante), des manuels servant à l’exécution des services (par exemple tous les codes de lois achetés durant mes études de droit ont été roulés dans mon cabinet INC. lors de son incorporation), un terrain, l’achalandage (clientèle), etc.
Un exemple concret
Parce que c’est toujours plus facile à comprendre avec un exemple, reprenons celui de Marc (toujours un nom fictif) et de son entrepôt.
Marc a acheté l’entrepôt en 2010 au prix de 50 000 $.
Aujourd’hui, son entrepôt vaut maintenant 150 000 $.
Option 1 – Marc vend l’entrepôt à sa société par actions
Marc doit donc vendre l’entrepôt à sa juste valeur marchande, soit 150 000 $ (sa valeur d’aujourd’hui). Ce faisant, Marc réalise un gain en capital de 100 000 $ (150 000 $ - 50 000 $). Il devra ajouter la moitié, soit 50 000 $, à sa déclaration de revenus personnelle pour l’année de la vente. Il devra donc payer de l’impôt sur ce montant supplémentaire.
Option 2 – Marc roule l’entrepôt à sa société par actions
Marc décide de rouler le bâtiment à son entreprise et choisit comme prix une somme de 50 000 $ (il s’agit s’une somme convenue et c’est permis par les lois fiscales!). Puisque le bien est roulé au prix de son achat en 2010, Marc ne réalise aucun gain en capital (50 000 $ - 50 000 $ = 0 $). La société de Marc sera propriétaire de l’immeuble et c’est elle qui paiera l’impôt sur le gain en capital, plus tard, lorsque (et SI) elle le vend à un coût supérieur de 50 000 $.
Mais qu’en est-il de la plus-value de l’immeuble?
C’est vrai, il ne faut pas que Marc perde cette plus-value. La société par actions va la reconnaître à Marc en lui remettant une reconnaissance de dette et/ou en lui émettant des actions de roulement en échange (que Marc conservera dans la société et qui pourront être rachetées dans le futur).
OK, et dans les faits, comment on procède?
Il faut tout d’abord consulter un fiscaliste pour préparer ce qu’on appelle un « mémo fiscal ». C’est dans ce mémo que nous, les avocats, y retrouverons toutes les instructions pour préparer l’ensemble des documents juridiques afférents au roulement.
C’est notamment le fiscaliste qui va établir sous quelles formes le paiement des biens sera fait : actions émises, argent, billet à demande (reconnaissance de dettes à rembourser).
Ensuite, les biens à transférer dans l’entreprise devront être évalués pour en déterminer la valeur et la contrepartie qui sera versée par la société.
Une fois le mémo fiscal produit, il suffit de nous l’envoyer, et nous préparerons les documents juridiques et légaux nécessaires (alors que le fiscaliste pourra remplir les formulaires fiscaux pour les transmettre aux autorités fiscales).
Conclusion
Oui le roulement fiscal entraîne des coûts supplémentaires pour payer les honoraires du fiscaliste et de l’avocate. Mais, les avantages sont non négligeables et particulièrement intéressant!
Par ailleurs, c’est un processus plutôt complexe pour lequel il est déconseillé de le faire soi-même. Ici, c’est primordial de s’entourer de professionnels qui ont l’expertise nécessaire pour procéder.
Alors, on roule tes actifs dans ta société par actions?
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