Un bon contrat de travail se doit d’inclure une clause de non-concurrence et une clause de non-sollicitation afin de protéger l’entreprise (l’employeuse) durant et après la relation d’emploi avec ses employés.
Attention, ces clauses doivent être valides afin de bien protéger l’entreprise. En effet, qu’advient-il en présence d'une clause de non-concurrence et/ou d'une clause de non-sollicitation abusive? Et demeurent-elles valides malgré le congédiement de l’employé? Et en l’absence de ces clauses, l’obligation de loyauté de l’employé s’applique-t-elle ? Voyons tout cela ensemble!
Définitions
La clause de non-concurrence
Il s’agit d’une disposition dans le contrat de travail en vertu de laquelle ton employé s’engage, pendant la durée de son emploi (et pour une période déterminée suivant la fin de celui-ci), à ne pas s’engager et/ou à ne pas travailler pour une entreprise concurrente à la tienne, et ce, sur un territoire déterminé.
La clause de non-sollicitation
La clause de non-sollicitation prévoit qu’un employé ne peut solliciter les clients, les fournisseurs, les distributeurs, les employés et les autres partenaires de l’employeur, pendant son emploi et pour une période limitée une fois le lien d’emploi rompu.
Toutefois, un client a le droit de continuer de faire affaire avec cet employé même s’il ne travaille plus pour ton entreprise. Tant que l’ex-employé n’a pas posé de gestes à l’égard de ce client pour le solliciter, il n’y a pas de contravention à la clause de non-sollicitation, car la décision vient du client et non de la sollicitation par l'employé (interdite par la clause dans son contrat de travail) .
Validité des clauses
La clause de non-concurrence dans un contrat de travail doit répondre aux exigences prévues par la loi pour être valide. Les critères de validité de la clause de non-concurrence sont les suivants :
La clause est écrite
La clause est rédigée en termes exprès (elle n’est pas ambiguë)
La clause est limitée dans le temps
La restriction est limitée dans une zone géographique raisonnable
La clause est limitée dans la nature des activités interdites.
Ces critères de validité sont cumulatifs, c’est-à-dire que le non-respect d’un seul de ces critères sera fatal quant à la validité de la clause. Cependant, il n’y a pas de règle universelle quand il est question des clauses de non-concurrence, il faut donc procéder à une analyse au cas par cas selon la situation précise.
Quant à la clause de non-sollicitation, elle n’est pas assujettie aux mêmes critères de validité que la clause de non-concurrence. Par exemple, la clause de non-sollicitation n’a pas besoin d’être limitée quant au territoire visé pour être valide, mais elle doit être limitée quant à sa durée.
Le territoire
La zone géographique visée par la clause doit être raisonnable. C’est le cas, notamment, s’il correspond au territoire dans lequel ton entreprise poursuit ses activités. Toutefois, si ton entreprise exerce ses activités sur un large territoire (ex. tu as une boutique en ligne qui expédie un peu partout), une clause de non-concurrence visant le Canada en entier pourrait être déclarée invalide par un tribunal.
Au moment de sa rédaction, il faut donc circonscrire et définir la zone géographique où l’entreprise exerce véritablement ses activités et restreindre le territoire avec des frontières délimitées.
Par exemple, les tribunaux ont invalidé une clause qui empêchait un employé de travailler chez une entreprise concurrente dans la « région de Montréal » puisqu’elle ne permettait pas d’établir avec précision le territoire restreint.
La durée
De façon générale, les tribunaux jugent raisonnables les clauses de non-concurrence avec une durée maximale de 12 mois après la fin de l’emploi. Pour la clause de non-sollicitation, les tribunaux admettent généralement une durée de 12 à 18 mois après la cessation de l’emploi.
Le type de travail
Il est essentiel de préciser et de clarifier les activités interdites et visées par la clause de non-concurrence. L’objectif d’une telle clause n’est pas d’empêcher l’ex-employé de gagner sa vie, mais de circonscrire le territoire et le travail qu’il peut faire chez une entreprise concurrente afin de protéger ton entreprise.
Attention aux clauses abusives!
Pour déterminer la validité d’une clause de non-concurrence, il faut analyser le caractère raisonnable des limites imposées en fonction de ce qui est nécessaire pour protéger les intérêts légitimes de ton entreprise. D’un côté, il faut protéger les intérêts légitimes de ton entreprise et de l’autre, il faut respecter le droit de l’ex-employé de gagner sa vie.
Par exemple, il serait déraisonnable de mettre dans un contrat de travail d’un cabinet d’architectes une clause de non-concurrence empêchant un architecte de travailler dans le domaine de l’architecture. On empêcherait alors un architecte de gagner sa vie si son lien d’emploi venait à se rompre pour une quelconque raison.
C’est à l’employeur (toi, ton entreprise) qu’incombe le fardeau de prouver que la clause de non-concurrence est valide selon les critères énumérés ci-dessus. Le tribunal devra être convaincu de la validité de la clause (selon la balance des probabilités, soit 50 % + 1), autrement il annulera celle-ci.
Contrairement à la croyance populaire, un tribunal ne peut pas ajuster ou réécrire une clause de non-concurrence pour la rendre valide. Ainsi, une clause ambiguë ou qui n’est pas rédigée en termes clairs et précis risque d’être déclarée invalide.
Pour évaluer le caractère raisonnable de la clause de non-concurrence et donc, sa validité, le tribunal prendra en compte, notamment, les éléments suivants :
Le niveau hiérarchique de l’ex-employé dans l’organisation
Le poste occupé et son importance dans l’entreprise
La durée de son emploi
La situation de l’ex-employé vis-à-vis les clients ou les partenaires d’affaires de l’entreprise
Etc.
Attention! Une clause dans le contrat de travail indiquant que l’employé reconnait le caractère raisonnable de la clause de non-concurrence ne vaut pas grand-chose! Le tribunal peut déclarer déraisonnable la clause de non-concurrence malgré la stipulation de reconnaissance par l’employé.
Et si j’ai congédié mon employé?
Si l’employé a été congédié sans une cause juste et suffisante, il n’est pas possible de se prévaloir de la clause de non-concurrence contenue dans son contrat de travail. Le même principe s’applique pour l’employé victime d’un congédiement déguisé.
En cas d’absence d’une clause de non-concurrence et de non-sollicitation, suis-je protégé?
La loi prévoit l’obligation pour l’employé d’agir avec loyauté envers son employeur durant son emploi ET pendant une certaine période suivant la fin de celui-ci. Cette obligation de loyauté implique, notamment, l’obligation pour l’employé d’agir avec honnêteté et l’obligation de faire passer les intérêts de son employeur avant les siens.
Cette obligation est imposée par la loi, donc le devoir de loyauté des employés existe même si elle n’est pas prévue dans le contrat de travail et même en cas de congédiement ou de démission.
Donc, si le contrat de travail signé par l’ex-employé ne contient pas de clause de non-concurrence, ce dernier pourra aller travailler chez un concurrent. Cependant, son obligation de loyauté lui interdit de nuire à ton entreprise ou d’utiliser, par exemple, les informations auxquelles il aura eu accès durant son emploi chez toi.
Écris-nous!
La clause de non-concurrence et la clause de non-sollicitation sont soumises à des conditions de validité essentielles pour trouver leur pleine application et pour protéger ton entreprise et tes intérêts. La rédaction de ces clauses et la rédaction du contrat de travail pour tes employés demeurent délicates et nous t’invitons à nous écrire afin d’obtenir des conseils et pour rédiger des contrats de travail légaux et conformes qui protègent ton entreprise.